Les personnes qui souffrent du syndrome ou complexe d’imposture (1)
doutent de leurs compétences. Cette forme courante de dévalorisation se
retrouve fréquemment chez les enfants et les adolescents. La chronique
de la coach scolaire et parentale, Nathalie Vancrayenest.
Le syndrome ou complexe d’imposture est lié à la peur de réussir. Les
personnes qui en souffrent doutent de leurs compétences, ils attribuent
leurs réussites à des causes extérieures. Elles vivent dans la peur
d’être démasquées. Celui-ci s’accompagne de stress, d’anxiété, d’un
sentiment de gêne et de honte. Les jeunes (comme les adultes) touchés
par ce complexe vivent de véritables angoisses, des stress importants à
l’idée de ne pas être suffisamment brillants, de ne pas être à la
hauteur.
Comme chez les adultes, les enfants et les adolescents ne parviennent
pas à demander de l’aide, car pour eux le risque est trop grand que les
parents, les enseignants, les copains s’aperçoivent de l’étendue de la
« supercherie ».
Leur estime de soi fragile accueille avec difficulté, les compliments
et feed-back positifs. Car s’ils surestiment les compétences des
autres, simultanément, dans un processus tout à fait irrationnel, ils
les estiment incapables d’avoir une vision correcte des capacités de
l'autre.
Les enfants, les adolescents pour protéger leurs systèmes de
croyances (« Je ne suis pas à la hauteur, je ne suis pas si intelligent,
si j’étais intelligent, je n’aurais pas de difficulté… ») adoptent deux
types de comportements.
En faire toujours plus. Ces enfants, ces adolescents
travaillent toujours plus pour l’école, ils ne sont jamais satisfaits
même avec des notes frôlant ou atteignant la perfection « L’évaluation
était nulle ! » « Un bébé réussirait cette interrogation ! ».
En faire un peu moins. Le sous-investissement est une
formidable stratégie d’échec. Ils peuvent ainsi justifier l’éventuel
échec. « Je n’ai pas assez travaillé », c’est plus acceptable pour une
faible estime de soi que « je ne suis pas intelligent ». En cas de
réussite, la chance pourra toujours être invoquée.
Ces deux stratégies renforcent les comportements qui amplifient à leur tour les croyances et la boucle est bouclée.
Des profils à haut risque
Tous les enfants peuvent à un moment ou un autre ressentir une
expérience d’imposture. Mais il existe des enfants plus susceptibles
d'en souffrir.
Les enfants et adolescents à haut potentiel qui
rencontrent des difficultés d’apprentissage ne comprennent pas
« pourquoi ils n’y arrivent pas », « pourquoi ils sont devenus
stupides » et l’idée d’être des imposteurs s’imposent à eux comme une
évidence. Les enfants combinant un haut potentiel avec un trouble DYS
sont particulièrement vulnérables au syndrome d’imposture.
Les enfants et adolescents soumis à la manipulation d’un parent pervers narcissique sont de « bons candidats » au syndrome d’imposture.
Comme le parent s’arroge les réussites de l’enfant (« c’est grâce à moi
que tu as réussi ton devoir de maths ») et rejette sur l’enfant les
échecs éventuels, ces enfants prennent l’habitude d’attribuer leurs
réussites à des facteurs extérieurs et leurs difficultés à des facteurs
personnels.
Il n'y a pas de remède miracle
Non, il n’existe pas de remède miracle au syndrome d’imposture.
Certains parents pensent qu’en complimentant leurs enfants, en
permanence, ils finiront par consolider leur estime de soi.
Malheureusement, les enfants n’intègrent pas les compliments et peuvent
même les trouver suspects.
Comme chez l’adulte, pour atténuer et en finir avec le syndrome de
l’imposteur, il est important de consolider l’estime de soi, jour après
jour.
Consolider son estime de soi
Pour construire son estime de soi, l’enfant doit se sentir en
sécurité physique, émotionnelle et mentale. Ce sentiment de sécurité
s’installera en lui au contact d’adultes attentifs et respectueux de ses
besoins vitaux : manger, boire, dormir, protéger, cajoler…. Que les
adultes qui l’entourent et s’occupent de lui soient émotionnellement
stables et que ses émotions soient nommées, acceptées.
L’enfant a aussi besoin de signes de reconnaissance clairs. Il est
aussi important que les adultes lui expliquent le monde, lui laissent le
découvrir et l’expérimenter. Qu’il rencontre des règles compréhensibles
et cohérentes.
Sur cette base de sécurité, il pourra développer son identité. Pour
cela ses parents devront abandonner leur vision de l’enfant idéal et
accueillir aussi bien ses forces que ses faiblesses et lui en faire
prendre conscience. Si l’enfant, l’adolescent est respecté comme une
personne à part entière (2) il se sentira aimable et capable. Il pourra à
son tour respecter les autres.
Connaître ses racines familiales, favoriser les contacts avec les
cousins, grands- parents aide aussi l’enfant à construire son identité. À
l’adolescence ce sentiment d’identité sera nourri par l’appartenance à
un groupe, une équipe.
Les parents pourront soutenir l’enfant dans son sentiment de
compétence en lui faisant confiance, en évitant de le surprotéger. En
lui accordant une autonomie en rapport avec son âge. Tous les enfants
aiment faire seuls « moi tout seul ! ». Mais, chaque fois que nous
faisons pour eux, plus vite qu’eux, nous leur envoyons le message qu’ils
ne sont pas capables !
Pour en finir avec le syndrome d’imposture, il est important de ne
pas mettre l’enfant en situation d’échec en ayant des attentes
irréalistes. De lui offrir des occasions de réussite en dehors de tout
contexte scolaire. Pensez à valoriser ses comportements positifs, ses
réussites, si minimes soient-elles, mais toujours de façon mesurée.
Un compliment n’a pas de valeur lorsqu’il n’est pas circonstancié
pour l’enfant, l’adolescent qui souffre du complexe d’imposture.
L’estime de soi est une assurance que l’on entretient, construit, développe toute sa vie et pour la vie.